Y a-t-il des règles tacites à respecter dans les toilettes des hommes ?

(Nous en profiterons pour répondre à Coralie C., qui nous demande par mail « Pourquoi les hommes ne rabaissent-t-ils jamais la lunette des toilettes ? »)

Oui, cela va de soi. Et leur respect est primordial. Ces règles sont imposées par la société depuis bien des années. Personne ne vous les a jamais enseignées, et pourtant vous les connaissez. Elles sont indispensables à votre survie dans la jungle des urinoirs publics. 

Règle n°1 : Un urinoir vide tu laisseras entre ton voisin et toi.

Lorsque vous arrivez dans des toilettes hommes constituées d’un mur d’au moins trois urinoirs, il est impératif d’éviter, si cela est possible, de se coller à un homme se soulageant dans l’un d’eux. C’est une question de respect. Et d’hygiène. Vous seriez incompris si vous ne respectiez pas ce point, et tout le monde vous regarderait de travers. 

Règle n°2 : Ton champ de vision tu contrôleras

Face à votre urinoir, il devient impératif de limiter votre champ de vision. Ainsi, vous êtes autorisé à regarder votre urinoir, votre Popol, vos pieds, et le mur dégueulasse qui vous fait face.  Si vous vous emmerdez en pissant, décryptez les lettres gravées sur la chasse d’eau (même si vous savez déjà pertinemment que vous y lirez « presto ») ou profitez-en pour vous appliquer à viser correctement. En aucun cas, vous n’êtes autorisé à regarder votre voisin, le pénis de votre voisin, ou derrière vous. Si jamais votre regard est attiré en dehors de votre champ de vision autorisé, débrouillez-vous pour loucher au maximum de votre orifice oculaire sans bouger la tête. Et ne vous faites pas repérer, sinon vous êtes foutu. 

Règle n°3 : L’urinoir du fond tu choisiras

Si vous arrivez devant un mur d’urinoirs vide d’hommes, vous avez, théoriquement, le droit de choisir l’urinoir qui vous sied. Mais vous savez très bien qu’en fait, vous n’avez pas tant de choix que ça. Pour optimiser au mieux le respect de la règle n°1, vous pouvez déjà oublier tous les urinoirs pairs (le numéro 2, le 4, le 6, etc). Et pour votre confort personnel et votre pudeur, quel que soit son niveau, vous oublierez également tous les urinoirs qui ne sont pas collés à un mur. Là, vous êtes à peu près libre d’aller où bon vous semble. Mais vous savez parfaitement que votre choix se portera sur l’urinoir le plus isolé de la porte d’entrée. 

Règle n°4 : Un pipi plus long que ton voisin tu feras

Si vous dégainez en même temps que l’inconnu qui est entré dans l’urinoir en même temps que vous, vous savez que vous entrez dans une compétition  farouche et sans merci : le pipi le plus long. Vous savez que celui qui urinera plus longtemps que l’autre emportera une victoire psychologique, et que le plus rapide à ranger son matériel sera rabaissé aux pieds de sa virilité. Il est formellement humiliant de finir votre affaire avant un homme qui était déjà là lorsque vous avez sorti le matos. D’ailleurs, vous remarquerez que, quand vous avez de la réserve et êtes confiant pour ce battle improvisé, vous avez tendance à diriger votre jet sur un endroit bruyant. Etaler sa confiance en soi effraie l’adversaire. Vous remarquerez également que, lorsqu’au contraire, vous vous soulagez d’une courte envie… vous faites tout pour uriner sur la faïence, pour étouffer au maximum le bruit. Vous espérez ainsi pouvoir grapiller quelques secondes en faisant semblant de ne pas avoir terminé. Mais vous savez que vous ne pouvez abuser de cette technique, et que vous ne pourrez rien face à un mec qui vient de terminer sa troisième pinte de bière. 

Règle n°5 : Le silence tu garderas

Entre la première goutte et l’essorage de votre engin, vous ne devez prononcer aucun mot. A moins d’être seul (vous pouvez alors chanter, vous parler, ou faire le point sur votre état « Wah mec t’es bourré ! »), les seuls sons que vous pouvez émettre sont le sifflement, le raclement de la gorge ou la toux. Cette règle peut être bravée si vous êtes proche de votre (vos) pote(s) de pisse. 

Règle n°6 : Tes mains tu feras semblant de laver encore plus assidûment si seul tu n’es pas

Vous savez pertinemment que votre priape est propre et vous contentez parfois d’un passage légèrement négligé de vos mains sous l’eau. Personne ne pourrait comprendre s’il vous voyait (mais tout le monde fait pareil). C’est pourquoi, si vous n’êtes pas seul dans les toilettes publiques, il est impératif d’utiliser du savon et de vous frotter les mains au moins trente secondes, entre-doigts compris, même s’ils ne sont pas plus sales qu’avant votre pause-pipi. Et, s’il n’y a plus de savon, vous vous devez d’émettre un grognement approximatif, ou tout autre son ou attitude faisant comprendre à l’autre personne que merde, c’est quoi ces toilettes à la con où il n’y a même plus de savon, vous êtes outré et pas habitué à sortir d’ici sans votre dose de savonnade. 

Règle n°7 : Personne tu ne toucheras, même après ton lavage de main

Dès lors que vous entrez dans vos toilettes communes, que ce soit avant ou après votre pipi, avant ou après votre lavage de main, ou même si vous n’êtes venus que pour remplir votre bouteille d’eau, il vous est formellement interdit de toucher quelqu’un d’autre. Même un ami. Bannissez la poignée de main pour un banal « Hey ! » (Vous pouvez parler à quelqu’un qui urine si vous n’urinez pas), voire un pudique hochement de tête ou sourire en coin (« tiens, toi aussi t’avais envie de faire pipi. C’est rigolo ça. »). Oubliez également la tape dans le dos (surtout si votre ami est concentré sur son ityphalle), le Je-t’attrape-par-l’épaule-pour-te-retourner (sous risque de vous faire arroser), et ne pensez même pas à l’accolade. Déjà parce que c’est sale, ensuite parce qu’un collègue peut rentrer à tout moment, et c’est suspect. Les seuls contacts physiques autorisés dans ces enceintes sont avec le pied, mais ce serait bizarre, donc évitez aussi.

Règle n°8 : En faisant caca, griller tu ne te feras jamais

Si jamais vous ne pouvez éviter la grosse commission dans un lieu public (c’est toujours mieux qu’entre deux voitures), vous devez respecter un processus très réglementé. Après un essuyage rapide de la cuvette, vous placerez trois feuilles à l’avant, trois feuilles à l’arrière, et quatre sur chaque côté de la cuvette. Vous limiterez au plus possible tout son suce-pet et jugerez équitablement de la quantité suffisante de papier pour ne tirer qu’une seule fois la chasse d’eau, sans tout boucher pour autant. Si vous entendez quelqu’un entrer dans l’espace public alors que vous êtes en pleine action, vous arrêterez tout subitement en attendant qu’il parte. Et, quoiqu’il arrive, vous ne sortirez jamais tant que vous n’êtes pas absolument seul aux toilettes (surtout au bureau, parce que dans un aéroport, c’est plus compliqué). Vous sortirez sûr de vous et resterez impassible : quelqu’un vous croisant dans le couloir des toilettes ne doit se douter de rien.

Oubliez les règles que votre maman vous a apprises. Certes, c’est bien de viser le trou, d’essuyer vos débordements, de laver vos mains avec du savon et de dire bonjour au monsieur. Mais les 8 règles ci-dessus sont indispensables à votre survie en milieu urino-public.

Pourquoi les garçons ne rabaissent-ils jamais la lunette des toilettes ?

(Coralie, par mail)

Par pur esprit pragmatique. Pourquoi rabaisser la lunette des toilettes alors que le suivant (ou la suivante) sera obligé(e) de la rouvrir pour en faire usage ? Les hommes, qui sont supérieurs aux femmes en raison de leur pénis, optimisent au mieux leur temps. Ouverture + fermeture d’une cuvette = 2,4 secondes. 2,4 secondes * 3 pipis par jour * 365,25 jours par an * 80 ans (espérance de vie moyenne d’un homme) = 210 384 secondes. 58,44 heures. 175 matchs sur Fifa. Faut pas déconner.